Kawasaki 900 Z1
Peur sur la ville
A la fin des années 60, Kawa est plus que jamais le constructeur de «motos d'homme» : les 500 Mach III, les 350 S2 et bientôt la 750 H2 sèment la terreur en ville ! Mais la grosse trouille viendra du sommet de la gamme dès 1972, la terrible et fantastique 900 Z1 ! 
Commençons par de la nostalgie, camarades! Souvent, une ancienne bécane nous ramène à des « images d'Epinal ». Concernant la 900 Z1, j'en ai plusieurs, je pense partagées avec beaucoup d'entre vous...
La toute première, c'est celle de la course poursuite du film « Peur sur la ville », avec Belmondo dans le rôle-titre: il y interprétait un flic enquêtant sur un tueur en série de jolies poulettes, dont le nom de code Minos et l'oeil de verre avaient de quoi terrifier le gamin que j'étais. Cependant, ce Minos affichait tout de même une qualité : celle de rouler en Kawa 900 Z1. La poursuite avec la R16 de Belmondo dans Paris était particulièrement cousue de fil blanc: une 900 Z1 ne pouvait laisser aucune chance à une R16 sur aucun terrain! En tout cas, les postures prises par le cascadeur sur la Kawa mettaient en valeur les qualités dynamiques de la moto : puissance, vélocité, esthétisme.
C'est encore le petit écran qui me fournira la possibilité à la fin des années 70 d'épancher ma passion de minot pour ce gros 4 pattes: la série TV américaine Chips montrait deux motards de la police US en Z... Certes 1000 et pas 900, mais les modèles sont assez proches pour être totalement apparentés. Là encore, la patate de la Kawa se voyait à l'écran, l'arrière s'écrasant, la fourche se déployant à chaque accélération des keufs! Enfin, la dernière image qu'il me reste de la 900 Z1, c'est une Madeleine de Prost, pardon, de Proust: j'accompagnais mon père chez le buraliste quand il allait acheter ses Gitanes filtres, et le patron du débit de tabac avait une 900 Z1 plantée sur la béquille. juste devant la vitrine. Pendant que mon père achetait sa came, je restais les yeux ébahis devant le monument! A quatre ou cinq ans, une 900 Z1, c'est un mur de chromes! Je l'avais entendu démarrer plusieurs fois: le bruit de tonnerre qui en sortait était aussi terrifiant que fascinant... La bécane était de couleur marron/vert avec des bandes jaunes, superbe. Un jour, le proprio l'a repeinte en blanc avec des étoiles bleues à l'aérographe: à chier. Et puis, il l'a revendue pour un 1300 Kawa. Un autre monstre...
SIMPLY THE BESTTout ça pour dire qu'une 900 Z1, ce n'est pas rien. Son étude remonte à la fin des années 60. A cette époque, pour Kawasaki, comme pour tout le monde d'ailleurs, le marché américain est essentiel. C'est là-bas que le japonais écoule une bonne partie de sa production, qui est d'ailleurs gaulée en fonction. En 1967, Kawasaki souhaite proposer une grosse cylindrée, puissante et performante, qui impose le respect L'idée est d'aller - au-delà, bien au-delà, de la concurrence directe, Honda. La machine doit être une sportivo-routière bien finie, bien équipée, et aux normes antipollution à venir: avec ses 3 cylindres 2 temps. Kawa est mal sur ce point... Aussi, c'est vers un 4 cylindres 4 temps tout beau tout neuf que l'on s'oriente. Une révolution pour Kawa, et surtout sa clientèle fidèle.
En octobre 1968, coup de théâtre, Honda présente sa CB750. Une révolution à deux roues. Kawa accuse le coup, puis, courbant l'échine, se dit que finalement l'apparition de cette machine mythique dès sa sortie n'est pas forcément un mal: elle va être la première de lignée, à essuyer les plâtres d'un point de vue commercial d'un 4 cylindres 4 temps. Si ça marche, Kawa aura eu le nez creux en décelant elle aussi le filon... Le succès de « l'ennemie » confirme qu'il y a une demande, mais oblige Kawa à faire « plus »... L'esthétique est définie vers 1970: les stylistes doivent impérativement se différencier de la Honda, afficher une identité Kawa, et faire en sorte que l'engin soit particulièrement désirable. On sera servi! Au printemps 1971, le prototype tourne: son 4 cylindres supercarré à la technologie moderne et raffinée (double ACT) cube 903 cm3, et sort pour les tests 95 ch! Evidemment, pour obtenir une grande fiabilité, on ramène cette valeur à un plus raisonnable 82 ch à 8 500 tr/mn, qui permet aussi de trouver une grande souplesse d'utilisation. En septembre 1972, la Kawasaki 900 Z1 fait ses débuts au salon de Cologne et met une grande claque: elle est belle, elle est ENORME! C'est évidemment aux USA qu'elle gagne alors deux surnoms: « Bike of the bikes » et « King of the road ». Tout un programme...
SENSATIONS FORTESEvidemment, ça intimide encore. Je serai éternellement un môme devant cette bécane. J'ai toujours l'impression d'être devant un mur de chrome. C'est d'autant plus frappant que nous sommes devant une Z1 B (après octobre 1974) dont le moteur n'était plus peint en noir... Tiens, rien que les deux doubles sorties d'échappement sont à élever au rang de sculpture moderne! Et cette ligne: le réservoir goutte d'eau, la longue selle, la queue de canard arrière, la déco... Elle déchire! Et puis en dessous, impossible à louper puisque la moto semble construite autour, le gros 4 pattes 900. Un morceau le pépère, frimeur en plus, avec son DOHC affiché sur les carters chromés... Va falloir l'enjamber.
Ouf, c'est du massif! C'est d'un lourd, les gars... Les temps ont bien changé! En revanche, la position de conduite me plaît assez: l'assise est assez basse, le guidon monte assez haut et a une grande envergure: certes, sur route, cela laisse une belle prise au vent, du genreà vous arracher les bras et les cervicales en cas de haute vitesse prolongée (mais désormais, les hautes vitesses prolongées, ça se fait rare...), mais en ville, ça permet de dominer son monde.
Accessoirement, ça facilite la manoeuvre de la direction à basse vitesse, assez lourde.
Heureusement, le poids s'oublie, la qualité reste dès qu'on commence à rouler tranquille. Enfin, qualité, pour l'époque: là aussi ça a bien vieilli. Mais la 900 Z1 était quand même bien équipée pour l'époque. Tiens, y'avait même un démarreur électrique. Je me voyais mal kicker la bête... Dès les premiers mètres, le 900 séduit: suffisamment coupleux, on sent une musculature bien présente, qui annonce du bon pour la suite des événements... Mais on comprend vite que la belle est une bête taillée pour les grands espaces. Et de l'espace, il lui en faut: tiens, rien que pour les freins. Oups, va falloir prévoir de la distance... Je ne sais pas comment on fait à 200 pour s'arrêter avec cette fusée?! Car elle pousse fort la garce! Certes, on est loin d'une sportive moderne, devenue un vraie vélo conduisible par ma grand-mère si elle en avait, et c'est bien ça qui fait - encore - tout le charme de l'engin: pour aller vite, il faut la tenir, et pour la tenir, il faut se cracher dans les mains... Sans lâcher le guidon. Car elle tortille bien du cadre la bougresse, ça frétille sous les fesses dès qu'on la brusque un peu. King of the road, d'accord, mais dans la street, c'est peur sur la ville. Excellente machine, belle à mourir, raffinée, et puissante, la 900 Z1 est de ces merveilles de jadis qui ont un statut de moto « culte » mérité. Elle a ses défauts, mais reste une usine à sensations. Et historiquement, elle a été lé début de l'escalade à la puissance en voulant passer (largement] devant la CB750...
Source : KM/H #1 août 2011
Sujet: Kawa 900 Z1 
Mer 30 Nov - 13:41
pôve Tonton, l'a cherché. 
